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Par Neve Solo

Chapitre 2 : Korriban.


La caravane avançait depuis deux jours dans le désert, sous les soleils de plomb. L’esclave s’occupait de son mieux de l’enfant qu’elle avait recueilli mais le peu de lait qui lui restait était insuffisant pour nourrir grassement le nourrisson. Ce dernier pleurait régulièrement, soit à cause de l’intense chaleur, de la faim ou tout simplement parce que les haillons dont il était vêtu étaient trempés. Les Tuskens étaient à bout de nerfs. Eux qui aimaient voyager tranquilles, ne s’encombraient jamais des femmes et des jeunes enfants qui restaient au village et là, ils ne pouvaient avancer sans que cette môme se mette à brailler. L’esclave faisait de son mieux pour calmer le bébé qui avait besoin de sa mère. Elle la serrait contre elle pour étouffer ses cris et la protéger des soleils tout en passant d’un gardien à un autre. Ils semblaient prêts à l’envoyer dans l’autre monde si elle ne se taisait pas rapidement.
-Je t’en prie…murmura t’elle dans un souffle. Tais-toi, je t’en supplie tais-toi…
Mais le nourrisson continuait de plus belle. Cet enfant n’était pas prêt à vivre sous un climat aussi aride et encore moins à voyager sans recevoir assez de nourriture. C’est alors qu’une affreuse sensation lui parcourut l’échine. Si ce n’était pas les Tuskens qui la tueraient, le désert se chargerait de lui faire la peau. Faire naître un enfant en esclavage c’était aussi idiot et stupide que de le jeter en enfer avant même sa naissance. Pourtant, elle ne voulait perdre espoir. Son enfant était mort-né et le ciel lui avait fait cadeau de cette petite fille en pleine santé au prix de la vie de sa véritable mère. Alors rien ne pourrait les séparer, rien ne serait capable de lui ôter cet enfant, pas même le sable, les Tuskens ou la famine. Elle était déterminée à la garder auprès d’elle et en vie. Les soleils arrivaient à leur zénith lorsque la caravane fit une pause. Les Tuskens allaient manger de leur côté, pendant que les esclaves pouvaient toujours grignoter quelques restes couverts de grains de sable ou bien asséchés par la chaleur. L’enfant pleurait toujours aussi fort dans les bras de l’esclave qui profita de la pause pour s’asseoir et la bercer…
Elle devait la tenir pendant toute la marche et ses bras engourdis étaient douloureux et maigres. Malgré cela, elle lui fit de l’ombre et commença à la bercer en priant pour que les cris cessent. Elle n’avait pas de lait à lui donner ou si peu qu’elle ne parviendrait pas à l’hydrater.
-Ne me laisse pas petite, me laisse pas toute seule. On est bientôt arrivé, tient le coup bébé.
Elle fixait les alentours, guettant le moindre mouvement des Tuskens. Ces monstres savaient pertinemment bien que le bébé avait besoin d’ombre et de quoi boire, mais ils n’allaient pas sauver l’enfant d’une esclave dont le cadavre séchait quelque part au beau milieu du désert sous les soleils jumeaux. C’était un miracle qu’il ait déjà survécu jusqu’ici mais ses limites étaient atteintes. Tout à coup, ce qu’elle redoutait le plus, se produisit. Deux Tuskens avançaient vers elle, à pas décidés. Elle craignit le pire et tenta encore et encore de faire taire le nourrisson qui ne comprenait pas que sa vie était en danger. Plus les deux hommes des sables s’approchaient, plus ses mouvements devenaient tremblants et plus la peur de la mort rongeait son maigre estomac. Mais l’enfant ne cessait de pleurer, ses cris résonnant dans le désert comme un cri d’alarme…
Arrivés à sa hauteur, elle leva avec crainte la tête vers les deux Tuskens. Elle les haïssait. Ils n’avaient pas de visage, elle ne voyait pas leur expression. Ils devaient rire du meurtre de l’enfant qu’ils avaient prémédité pendant le chemin ou bien, agacés, ils avaient les dents serrés et la fixaient avec mépris et colère. Mais non, rien, rien que des visages figés, des poupées de tissus…
Un frisson dégringola l’échine de l’esclave qui n’osait dire quelque chose. Le silence des deux Tuskens juste au-dessus d’elle était un véritable supplice. Elle priait pour qu’ils repartent et laissent l’enfant en paix, mais une autre part de son être sollicitait que le sacrifice soit rapide et indolore, ainsi la souffrance du bébé serait terminée.
Peut-être aurait-il mieux valu que ce soit le cas…

L’un des hommes des sables tendit quelque chose à l’esclave en poussant une exclamation qui avait le ton d’un ordre et en indiquant d’un geste brusque le nourrisson toujours en larmes. En observant l’objet, elle remarqua qu’il s’agissait d’une gourde improvisée en biberon qui contenait un liquide blanchâtre. Du lait ? Elle approcha ce qui devait être une tétine de la bouche de l’enfant qui se mit à boire goulûment. Le silence retomba immédiatement sur le désert comme un léger voile et les Tuskens repartirent en silence. La jeune femme ne pu retenir davantage les larmes de crainte et de soulagement qui inondaient ses yeux. C’était un miracle. Cet enfant était une miraculée des sables. Incroyable, c’était tout simplement incroyable. L’émotion était si grande, si intense que les larmes lui trempèrent le visage et que son rire remplaça les cris du bébé mais à une échelle beaucoup plus discrète. Cet enfant était béni par la Force, cela ne pouvait être autrement. Là haut, quelqu’un veillait sur elle.

Après ce léger repas, la caravane reprit sa route. La chaleur n’avait fait qu’augmenter et le sable bouillant brûlait la plante des pieds des esclaves agonisants sous les soleils. Plus les jours passaient et plus il était difficile d’avancer. Les brûlures, la chaleur, le manque de sommeil et de nourriture ; tous ces facteurs faisaient de Tatooine un enfer pour ses esclaves. Mais l’une d’entre eux, était aux anges. Non, rien, rien ne pouvait à présent être néfaste, rien ne pouvait plus lui faire de mal. Elle en oubliait la faim, la soif, la chaleur et la douleur. Entre ses bras, somnolait un nourrisson repus et en bonne santé. Entre ses maigres bras tannés et brûlés par les soleils jumeaux respirait un petit être insouciant, sauvé d’une mort certaine par le Destin.

Les Tuskens stoppèrent la caravane au coucher des soleils. C’était inhabituel et la crainte gagna encore une fois l’esclave qui serra l’enfant contre elle. La petite Neve dormait encore sagement blottie contre sa poitrine. La jeune femme regarda autour d’elle pour comprendre ce qui se passait, mais ne parvint pas à trouver de réponse. Les Tuskens avaient tous disparu excepté les deux gardiens qui les surveillaient d’un peu plus loin, leur arme chargée et prête à tirer au moindre mouvement suspect. Dans un murmure, elle hasarda à son compagnon d’infortune, juste devant elle :
-Que se passe t’il ?
-Je crois que quelqu’un arrive.
-Ça veut dire qu’on est proche d’un astroport ?
Il acquiesça d’un signe de tête. Elle ne sut pas si elle devait être joyeuse ou tout simplement angoissée. Heureuse car son calvaire avec les Tuskens allait prendre fin, mais angoissée à l’idée que les acheteurs potentiels la séparent de l’enfant. Ils restèrent ainsi debout pendant plusieurs minutes, à se demander ce qui allait se passer avant que trois personnes accompagnées d’un seul Tusken ne reviennent vers eux. L’esclave les détailla en silence.
Deux d’entre eux étaient humains, le premier devait travailler pour la maison de Jabba. Il était vêtu d’une toge beige sale, mais à sa ceinture pendait une bourse qui semblait assez lourde pour tordre la gaine de cuir. Seuls les Hutts possédaient une telle fortune sur ces terres et aucun contrebandier ou marchand ne serait assez stupide pour arborer son argent d’une telle manière sauf s’il était sûr d’être sous la protection de la puissance principale de la planète.
Le second était étrange, il marchait déjà en retrait et elle ne put distinguer son visage. Il était tout bonnement vêtu d’un noir de geai et il régnait comme un malaise autour de lui, car ni les Tuskens, ni les deux autres acheteurs ne restaient en sa compagnie. La capuche de son énorme et lourd manteau était relevé au-dessus de sa tête, lui donnant un air encore plus mystérieux. Comment un homme, par une telle chaleur, pouvait il se permettre de se vêtir ainsi sans mourir de chaud ? Soudain, il lui sembla que cet homme levait les yeux vers elle. Bien entendu, elle n’aurait pu en être certaine, étant donné qu’elle ne distinguait pas son visage, mais elle sentit un regard froid s’abattre sur elle et lui geler la moelle des os. Elle passa rapidement au dernier visiteur. Il s’agissait d’un Rodien. Vêtu tel un conquérant de l’espace, il devait s’agir d’un contrebandier ou d’un marchand interplanétaire. A sa taille pendait un blaster dernière génération qu’il arborait avec fierté. A l’évidence deux d’entre eux étaient riches mais le dernier était le plus à craindre.

Lorsqu’ils arrivèrent à leur hauteur, le Rodien et l’humain vêtu de beige se dirigèrent vers la tête du cortège d’esclave alors que le dernier visiteur se dirigea immédiatement vers elle. Ce fut comme une certitude immédiate lorsqu’elle le vit s’éloigner du Tusken, des deux autres et descendre la file à pas modéré. Ce qui l’a surpris davantage ce fut l’inertie des Tuskens. Ils ne s’interposèrent pas dans la précipitation d’un de leur visiteur qui chamboulait leur organisation stricte. Ils semblaient lui accorder toute la liberté nécessaire alors que les deux autres devaient suivre le déroulement de la vente comme les Tuskens le leur avaient imposé. En moins de quelques minutes, l’homme encapuchonné fut à sa hauteur. Tête baissée, elle lui tournait le dos. Elle avait peur, froid, terriblement froid. Elle tremblait et priait pour qu’il s’éloigne d’elle au plus vite. Elle sentait sa présence en elle et autour d’elle. Il était là à l’intérieur et à l’extérieur, une présence omnipotente, omniprésente. Un dieu froid et terriblement terrifiant. Il semblait la dépeindre de l’intérieur comme si un scanner sondait la moindre de ses molécules. Elle sursauta en poussant un cri, lorsqu’une main violente s’abattit sur son épaule pour lui faire exécuter un demi-tour. Manquant de tomber, elle du s’accroupir pour ne pas se retrouver dans le sable. N’osant pas relever la tête vers ce monstre elle tremblait intérieurement. Elle voulait qu’il s’en aille, qu’il s’éloigne, qu’il la laisse. Elle ne désirait rien d’autre. Pourtant il maintenait toujours son épaule avec une force froide et douloureuse. Elle ne pouvait se relever et le moindre mouvement lui faisait ressentir une douleur atroce.
Soudain, le silence fut brisé par les reniflements du bébé qui n’allait pas tarder à recommencer à pleurer. Le nourrisson se mit à gigoter et poussa quelques petits cris avant de pleurer.
Comme surpris, l’homme relâcha son étreinte sur l’épaule de l’esclave qui en profita pour se relever. Ce mouvement brutal eu pour effet d’accentuer les pleurs du bébé qui venait d’être secoué. Paniquée, l’esclave ne désirait qu’une chose, fuir, courir loin de cette affreuse présence qui la perçait à nu. Elle tira sur la corde, les yeux s’imprégnant de larmes alors que l’homme vêtu de noir revenait auprès d’elle dans un calme olympien. Continuant à tirer de toutes ses forces, elle perdait espoir au fur et à mesure que l’homme s’approchait d’elle faisant croître en elle une angoisse jusque là jamais ressentie. Elle avait beau s’éloigner, repousser au maximum les limites de la corde dans un sens ou dans un autre, il finissait toujours par s’approcher trop près d’elle. L'inquiétude était telle qu’elle ne prenait plus conscience des Tuskens qui commençaient à devenir nerveux à la vue de ses mouvements ni même des deux autres acheteurs qui regardaient la scène avec un léger sourire.
Soudain, la corde céda. Miracle ou non, elle en profita pour détaler. C’était la chance qu’elle espérait. Mais elle ne parvint pas à faire une dizaine de mètres que déjà un tir l’arrêtait en pleine course. Son dos. Son dos brûlait, sa poitrine brûlait…ses yeux piquaient, elle ne respirait plus. Elle voulut crier, mais aucun son ne sortit de ses lèvres scellées. Seuls ses yeux reflétaient l’immuable certitude oubliée quelques secondes à cause de la peur…les Tuskens étaient encore là…
Pourtant, elle avait eu la certitude d’avoir été seule avec cet homme étrange…il lui avait fait voir des choses affreuses, il voulait l’enfant...
Mais déjà son esprit s’embrumait et la douleur s’atténua brusquement. Le silence le plus total l’enveloppa alors que tous ses membres s’engourdissaient. Un étrange sommeil la gagna et, se laissant emporter par lui, elle céda à la mort.
L’un des gardiens Tuskens qui lui avait tiré dessus s’était approché d’elle et vérifia qu’elle était bien morte. Il retourna le corps qui était tombé sur le ventre d’un coup de pied et dégagea l’enfant hurlant d’un geste brusque, augmentant ses cris.
L’homme vêtu de noir s’était lui aussi avancé mais s’était arrêté un peu plus bas. Il attendit patiemment que le Tusken lui apporte l’enfant. Il saisit le nourrisson dans ses bras et l’observa quelques secondes, le sondant. Satisfait, il s’éloigna d’un pas lent, dans la direction par laquelle il était arrivé. L’un des hommes des sables tenta de l’arrêter, exigeant d’être payé pour le bébé, grondant dans sa langue quelques paroles que l’homme ignora. A la surprise des autres esclaves, le Tusken n’insista pas et ne tenta même pas de le tuer pour cette action délibérée et contraire à toute leur culture.

D’un pas lent, le Sith s’éloignait, le nourrisson dans ses bras. La fillette avait cessé de pleurer. Tétanisée, elle n’osait même pas remuer le moindre membre dans les bras de cet homme qui venait de l’arracher aux griffes de l’esclavage sur Tatooine. Il l’enveloppait d’une aura froide et terrifiante. La chaleur du corps de l’esclave s’était brutalement envolée, pour laisser place à ce néant. Les soleils jumeaux n’étaient même pas assez brûlants pour la réchauffer et pour apaiser ce calme craintif. Ses grands yeux bleus étaient braqués sur la silhouette noire qui foulait le désert de sa présence obscure et elle ne savait pas encore que l’esclavage qui l’attendait était bien pire encore que celui de Tatooine ou de tout autre monde éloigné du Noyau.

Le Sith posa son regard sur le bébé qu’il tenait entre ses bras. Certes, c’était une enfant, une fille, mais elle avait en elle un potentiel bien plus important pour lui que tout ce ramassis de poussière et de sable. La Force était en elle. Comment avait-il pu être stupide au point de croire que le rayonnement qu’il sentait depuis quelques jours venait de cette femme ! Entre ses bras, se trouvait son avenir, sa gloire, sa puissance. Ses projets allaient enfin devenir réalité et quoi de mieux pour les exécuter que de trouver par soi-même le premier élément pur, la première pierre fondatrice…
Il se félicitait d’avoir écouté son rêve et d’être venu jusque sur cette planète puante et poussiéreuse de la bordure extérieure.

Lorsqu’il atteignit l’astroport, il faisait déjà nuit noire. Les rues étaient désertes et sa présence sombre et silencieuse passa inaperçue. Il se glissa furtivement dans le noir jusqu’à sa navette. Le vaisseau était un petit biplace à la coque grise, ternis par le temps. Ce n’était pas ce qu’on pouvait appeler une flèche, mais il était sûr et solide. Il monta à bord dans le silence le plus total, déposa l’enfant sur le second siège dans un couffin de fortune puis, s’asseyant à côté, il checka les systèmes et décolla quelques minutes plus tard.
Le vaisseau s’éleva dans un souffle rauque au beau milieu de l’obscurité puis se stabilisant dans sa montée dévia légèrement sur la gauche avant de s’élever plus rapidement en direction de l’espace.
Atteignant l’espace intersidéral, le Sith coordonna les systèmes de mise en hyperespace et lorsque les voyants passèrent au vert, il déclancha l’hyperdrive. Se tournant vers le bébé qui s’était endormi, il déclara d’une voix grave :
-Dans quelques jours, nous serons à Korriban.

Lorsque la navette décéléra et se stabilisa en orbite de la planète d’arrivée, le Sith sembla soupirer de soulagement. Il retrouvait enfin le monde qui le nourrissait, celui qu’il n’aurait jamais du quitter. Située en pleine bordure extérieure, cette petite planète grise semblait pour le moins inintéressante et dénuée de tout intérêt. Cependant, c’était ici que les Siths venaient se recueillir, c’était sur cet immense désert de poussière grise que somnolait la puissance de tout un ordre. Lorsque le vaisseau entama sa descente dans la maigre atmosphère des lueurs bleutées enveloppèrent la navette. Dès que la haute atmosphère fut dépassée et que le biplace se stabilisait dans la troposphère, le paysage dévasté s’étala dans toute sa déchéance. Ce monde n’était qu’un immense tas de poussière agrémenté de quelques montagnes sombres. Rien ne semblait vivre ou germer en ce lieu maudit. Les seules traces d’une quelconque culture se fondaient dans le paysage grisâtre et mieux valait ne pas s’en approcher car l’esprit des anciens Sith y survivait.

Lorsque le vaisseau se posa, il sembla appartenir entièrement à la planète, tant par la couleur que par sa pâleur. Un œil non avertit n’aurait rien remarqué à la surface. Le Sith descendit, tenant dans ses bras le nourrisson qui s’était habitué à sa présence glaciale. Lorsqu’il posa le pied sur le sol de Korriban, il s’accroupit et saisit une poignée de poussière dans sa main droite. L’amenant à hauteur de son visage il inspira profondément. Cette odeur, cette sensation semblait le soulager et en même temps lui redonner une force inattendue. Il poussa un soupir de satisfaction et laissant tomber quelques grains sur le visage de la fillette qui commença à pleurer sous cette attaque poussiéreuse, il déclara :
-Bienvenue en terre Sith, la grande Korriban.
Sa voix avaient changé et semblait presque…heureuse. Il lâcha la poignée de particule et soulevant le nourrisson à bout de bras il s’écria :
-A vous tous, mes Pères ! Je vous offre cette enfant qui sera l’instrument de notre vengeance ! Elle et ses frères amèneront la Sith à la victoire.
Un vent glacial se leva alors et il sembla que des voix se soulevaient du sol et rejoignaient ce vent dans une complainte assourdissante et malsaine. Toujours au bout des bras du Sith, Neve pleurait à présent à s’étouffer. Elle avait peur, froid, mal et dans son petit esprit à peine ouvert au monde venait de passer plus de génération d’esprit Sith qu’elle n’aurait d’années à vivre…
Lorsque le vent retomba ainsi que la complainte de toutes ses âmes torturées le Sith ramena la fillette à lui. Elle ne parvenait plus à respirer tant elle avait hurlé.
Un rire sombre s’éleva alors :
-Reprend ton souffle petite créature si tu ne veux pas servir de dîner.
Le Sith qui la tenait se tourna d’un geste lent vers le nouvel arrivant et rétorqua d’un ton froid mais dangereusement calme qui calma brutalement les pleurs de l’enfant :
-Ténoren, est-ce ainsi que tu accueilles ton nouveau général ?
Le silence retomba brutalement entre les deux Siths. Celui répondant au nom de Ténoren fixa le nourrisson avec colère et cracha un juron.
-Comment ? Grogna t’il. Je croyais que je serais nommé général de ton armée ! C’est quoi cette histoire ? Cette espèce de saloperie couineuse ne sera jamais mon supérieur tu entends !!
Il n’eut pas de réponse. Il plissa le nez comme si la fillette émettait une odeur répugnante et fit une grimace d’écoeurement. C’est alors qu’un rire froid résonna à ses oreilles. Cela eut pour effet de calmer sa témérité et il recula d’un pas. Humain basique de taille moyenne, Ténoren était largement plus petit que son interlocuteur. Son crâne nu couvert de cicatrice se mit à luire sous la crainte que lui engendrait ce rire froid dénué de tout humour.
Brusquement le rire cessa et la voix froide du Sith s’éleva calmement :
-T’ai-je déjà donné le choix Ténoren ? Et te le laisserai-je jamais ? Ce sont deux questions sur lesquelles tu dois méditer. Maintenant écarte-toi de mon chemin…
-Oui, Maître. Souffla Ténoren en s’écartant. Mais avant que tu ne partes…j’aimerai savoir quand est-ce que je…enfin…les épreuves ? Hasarda t’il sentant l’impatience de son maître croître.
-Tu les passeras le même jour qu’elle.
-C…comment ? Murmura t’il, tentant de contrôler son énervement.
-En attendant entraîne-toi, tu en auras besoin.
Il s’éloigna lentement du vaisseau, tenant Neve dans ses bras. Une longue marche de trois heures s’annonçait à lui jusqu’à son repaire. En effet, il avait posé sa navette très en retrait de l’endroit où il avait établi sa base. Ainsi, les esprits Sith qui hantaient la base n’étaient pas perturbés dans leur souffrance et si quelqu’un trouvait le vaisseau, il lui faudrait beaucoup de détermination pour retrouver sa trace. Ils étaient plusieurs Seigneurs Siths à s’être établis sur Korriban ayant tous des projets personnels différents du sien. Et il ne voulait pas que le sien soit découvert avant que tout ne soit prêt. Ténoren était son plus jeune frère et apprenti. Ils avaient rejoint la Sith dès leur plus jeune âge et il avait passé les épreuves avec succès contrairement à Ténoren. A la mort de leur maître, il avait pris la formation de son frère sous sa tutelle et avait commencé à établir son plan de conquête. Ténoren était un faible. Il n’était pas capable de passer les épreuves et d’y survivre. Cependant, il était un adversaire assez coriace et perfide.
La marche semblait s’éterniser dans ce silence obscur dans lequel régnait la planète mère des Siths. Cependant, rien ne vint troubler ce silence. Le nourrisson était tétanisé dans les bras de cet homme froid. Elle sentait le vide qui l’entourait et avait peur. Elle ne connaissait pas cela, et malgré son très jeune âge, elle percevait les mauvaises intentions des esprits qui naviguaient autour d’elle et en particulier de celui qui la tenait dans ses bras. Le Sith conservait toujours la même cadence de marche et les kilomètres s’effilaient dans un rythme régulier, presque berçant. Lorsqu’il s’arrêta, cela éveilla le bébé qui osa émettre un petit son de désapprobation.

Devant le Sith se dressaient à présent les ruines d’un mausolée. Sombres et décrépies, l’érosion avait déjà sérieusement entamé les ciselures de la pierre et autres gravures. Elles s’étalaient sur plusieurs mètres de diamètre et étaient hautes de plusieurs mètres par endroit. Il n’y avait plus de toit et les colonnes qui l’ornaient étaient presque toutes tombées. Il gravit les quelques marches poussiéreuses qui menaient dans le cercle intérieur du mausolée tel un pèlerin avançant dans un lieu sacré. Arrivé au milieu, il s’arrêta et leva les yeux vers le ciel sombre. Il entrait dans une étrange transe mais il cessa rapidement et revint à lui-même presque aussitôt. Il laissa glisser sa main sur l’air dans un arc de cercle imaginaire. Quelques secondes plus tard, cela eut pour effet de faire descendre avec lenteur, l’épaisse pierre sur laquelle il se tenait. Dans un sifflement mécanique, la pierre descendait à vitesse réduite dans un sous-sol obscur et humide. Un bruit sourd accueillit l’arrêt de cet ascenseur de fortune et le Sith descendit de son juchoir avant que ce dernier ne remonte. A l’arrivée du Sith, quelques lumières blafardes et lointaines s’allumèrent créant une légère luminosité dans le couloir sombre. Une haute silhouette s’approcha et s’agenouillant devant lui, déclara :
-Seigneur Atodeinon. Je suis heureuse de vous revoir.
Elle se releva et repoussa la capuche de sa bure sombre. Son visage scarifié avait perdu toute trace de beauté, seuls ses yeux verts, pénétrants reflétaient encore ce que devait être son éclat d’autrefois. Ses cheveux roux étaient coupés très courts lui donnant un aspect de mort vivante si l’on faisait cas de son étrange pâleur.
-Kaleb. Que fais-tu ici ?
-On m’a appelé. Les couveuses ont eut un petit problème la nuit dernière.
-De quelle nature ?
-Je n’en sais encore rien maître.
-Tu as pu réparer l’anomalie ?
Ils avançaient à pas rapides dans les couloirs.
-Je n’ai que pu faire un transfert…mais cinq sont morts.
-C’est intolérable. Répondit-il d’un ton froid.
-Je le sais. Si j’avais été prévenue à temps, j’aurais certainement pu sauver tout le monde.
-Je croyais que Katan s’en occupait ?
-Mon frère a été envoyé par Darth…
-C’est bon. Coupa le Sith. Rachète vos fautes en t’occupant de cette enfant, et veille à ce qu’elle soit en bonne santé. Si elle meure, je vous condamne tous les deux aux souffrances éternelles !
Il tendit le nourrisson à Kaleb qui l’observa, surprise avant de s’arrêter. Atodeinon continuait son chemin. Il allait certainement se rendre aux couveuses pour constater lui-même les dégâts.
Elle regarda la fillette aux grands yeux clairs et déclara :
-Tu m’as sauvé la peau pour une fois. Je te revaudrais ça en supportant tes jérémiades !
Elle marcha encore un peu dans le couloir avant de s’arrêter devant une porte métallique noire qu’elle ouvrit sans plus de douceur qu’un Bantha dans une Cantina. Elle entra dans une petite pièce sombre dans laquelle se tenait un lit et un coin ressemblant à une salle d’eau. Elle posa la fillette sur le lit avec une douceur qui laissait à désirer et s’assit à l’autre bout en soupirant. Regardant le nourrisson d’un air de dégoût, elle marmonna :
-Qu’est-ce que je vais faire avec toi moi ? J’ai rien à bouffer alors je vois pas pourquoi tu devrais avoir un régime de faveur. En plus tu dois pisser partout et dégueuler quand t’as trop bouffé…merde…
Elle soupira tout en se laissant tomber sur le lit qui émit un gémissement de mécontentement. Neve gigotait tranquillement dans son coin, se sentant enfin apaisée de la présence du maître Sith. Ses grands yeux passaient du plafond à ses petites mains et de celles-ci au plafond. Elle affichait un petit rictus et s’amusait de rien. Pour la première fois de sa courte existence il lui semblait être en paix et être soulagée. Elle remuait depuis plus d’une dizaine de minutes et se rapprochait dangereusement du bord du lit. Seulement Kaleb avait les yeux rivés au plafond et marmonnait quelques insultes. L’adolescence n’était pas vraiment l’âge facile pour un Sith et avoir quatorze ans l’était encore moins. Certes elle avait une silhouette d’adulte, mais à l’intérieur, ce n’était encore qu’une enfant. Elle n’avait pas envie de s’occuper de cette petite merde comme elle venait de la surnommer intérieurement, mais si cela pouvait lui épargner la vie et celle de son frère, c’était ce qui valait le mieux. Soudain, un bruit sourd la fit émerger de ses rêveries. Ce bruit fut rapidement accompagné par un lourd silence. Se redressant d’un bond, la jeune Sith regarda le haut du lit. Le bébé n’y était plus. Paniquée, elle se hâta vers le petit corps qui semblait endormis au pied du lit…
-Il va me pulvériser… Souffla t’elle en tremblant.
Ne perdant pas une seconde elle sortit de sa chambre en courant, l’enfant dans les bras.
Elle traversa la moitié du complexe sous terrain jusqu’à la salle des couveuses où se trouvait Atodeinon. Elle entra dans la salle aseptisée et s’écria :
-Maître !! Il y a un problème avec la petite !
Le Sith se retourna aussitôt et saisit le nourrisson des bras de l’adolescente. Elle ne pu voir son regard, mais elle su parfaitement qu’il était enflammé et que le moindre mot de trop signifierait son exécution.
Elle recula de quelques pas vers la sortie, espérant s’éclipser et ne pas subir le courroux de son maître. Mais elle fut stoppée dans son élan et devint comme paralysée. La Force affluait partout autour d’Atodeinon. Il concentrait son énergie sur le bébé mais conservait une part pour la retenir. Tout effort aurait été vain pour s’échapper et elle ne résista pas. Soudain, la voix du Sith résonna de son esprit :
-J’ai toujours été équitable avec toi Kaleb. J’ai toujours été juste envers toi et tes actions. Maintenant sache une chose : j’en ferais de même avec elle. Une vie pour une vie.
Kaleb n’eut pas le temps de répondre ou de faire des excuses que déjà une étrange douleur gagnait son organisme. Elle se sentait broyée de l’intérieur par une force beaucoup plus importante que sa résistance. La douleur, elle avait mal, très mal, mais ne pouvait pas crier. Sa vie était aspirée de son corps et était réorientée vers celui du nourrisson. Chaque brin de vie était arraché par la Force qu’elle avait fait sienne lorsqu’elle était entrée dans l’ordre Sith et elle ne pouvait rien y faire. C’était un adversaire trop puissant, elle aurait du faire plus attention…mais qui peut faire attention à quatorze ans ? Qui peut se sentir responsable à cet âge où d’autres questions sont plus importantes ! Elle n’avait pas voulu désobéir, elle méritait une punition, mais pas la mort…
Ne pouvant se défendre, ne pouvant plus parler, elle se laissa vider sans résistance, en silence. La vie était trop dure, trop injuste. Elle voulait sauver son frère. Peut-être que Atodeinon serait plus indulgent avec lui si elle se laissait faire. Quoi qu’il en soit, malgré tout, elle respectait la décision de son maître. Il avait raison, elle avait tort. Il était le maître, elle était l’apprentie. Il n’y avait pas de paix, il y avait la colère. Il n’y avait pas de peur, il y avait le pouvoir. Il n’y avait pas de mort, il y avait l’immortalité. Il n’y avait pas de faiblesse, il y avait le côté Obscur. Elle était le cœur de l’Obscurité et ne connaissait pas la peur, mais elle l’infligeait à ses ennemis. Elle était le destructeur du monde et connaissait le pouvoir du côté Obscur, elle était le feu et la haine. Tout l’univers s’inclinait devant elle et elle s’était engagée dans l’obscurité où elle avait découvert la vraie vie. Dans la mort de la lumière elle était un Sith, le fléau des Jedis. Et pour cette cause, elle perdit la vie..
Le nourrisson reprit vie, en tremblant. L’énergie de la jeunesse de Kaleb avait servit au Sith, à l’aide de quelques manipulations de la Force Obscure à rendre la vie à Neve. Mais cela avait coûté celle de l’adolescente qui gisait au sol, inerte.
Atodeinon se tourna vers le cadavre et déclara d’un ton froid :
-Tu ne méritais pas de prononcer les mots que tu as pensés. Faible tu es née et tu es morte en faible.
Il cracha sur son corps et sortit de la salle où se tenait les couveuses, le bébé dans ses bras. Dans un silence de mort il traversa les couloirs froids et humides qui le menaient jusqu’à ses appartements. Plus grands et plus spacieux que ceux de Kaleb ils étaient ornés de tentures sombres. Un grand lit se tenait au fond de la pièce aux côtés de sculptures antiques de la période de gloire des Siths. Il déposa l’enfant au centre du lit et l’entoura de coussins et autres couvertures pour qu’elle ne tombe pas. Il l’observa quelques secondes avant de déclarer :
-Tu seras digne de l’ordre Sith. Tu seras mon arme et tu détruiras la galaxie pour moi. Patience et dans quelques années je pourrais commencer ta formation. Tu ne seras pas faible comme Kaleb, Katan et Ténoren, non bien au contraire ! Ton Destin est gravé dans ces murs…Neva…
Mais déjà le nourrisson s’était endormi. Toutes ces épreuves à l’aube de sa vie, étaient beaucoup trop importantes pour son petit corps fragile.
-Tu seras le général de ta génération de guerriers Siths