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Par Lusiana Windu



J’avais à peine terminé ma phrase que la jeune femme avait déjà quitté le cockpit. Ce fut aussi ce moment que les instruments choisirent pour devenir complètement fous. Je n’avais plus d’autre moyen pour me diriger que de me fier à la Force et la laisser me guider. J’échangeais des instructions saccadées avec ma padawan. Le vaisseau tremblait de toutes ses tôles. J’arrivais tout juste à le stabiliser.

Ce fut alors une vision d’horreur. Une paroi verticale, froidement minérale et terrifiante apparut devant nous. En un éclair, j’avais viré sur l’aile bâbord et je fis plonger le vaisseau dans un canyon escarpé et désolé. J’entendais le vent siffler autour du vaisseau.
Quelques secondes plus tard, un bang sinistre simultané à une épouvantable secousse nous fit comprendre que nous avions lourdement heurté les rochers. Le vaisseau partit comme un fou, complètement déstabilisé, devenant la proie incontrôlable des rafales de vent. Je devinais plus que je n’entendais le carré être mis sans dessus dessous, et nos affaires voltiger contre les cloisons. J’espérais seulement que Kiara et ses enfants avaient pu se sangler solidement avant ce maelström intérieur.

La Force… le calme. Il ne fallait pas que je cède à l’angoisse. Il fallait que je garde confiance en la Force pour qu’elle me permette de guider le vaisseau. Se poser. Il fallait se poser le plus rapidement possible. Je ne distinguais plus rien du paysage qui défilait à une allure vertigineuse devant nous.
Un grondement sourd nous brisa alors les tympans. Nous venions à nouveau de heurter la roche. Mais cette fois, nous glissions sur le sol, emportés par notre élan. Le vaisseau rebondissait sur les parois des falaises du canyon comme une balle dans les raquettes des joueurs de bolow ball. La violence d’un des chocs fit s’arracher mon harnais. Ma tête alla violemment heurte le tableau de commandes. Je n’étais plus qu’une poupée de chiffon désarticulée.
" _Maman ! " Entendis-je alors hurler.
Et ce fut le trou noir.
Le vaisseau continua sa course folle pendant encore quelques longues secondes. Les moteurs s’étaient coupés, en même temps que tous les systèmes se déconnectaient les uns après les autres.
Et puis, ce fut le calme, oppressant et inquiétant lorsque l’engin s’arrêta, secoué encore de quelques soubresauts.
" _Kiara ?
_Tout va bien, Ma-Lahossa. Nous avons juste quelques bleus. "
Les enfants, tétanisés par la peur durant notre folle glissade se mirent alors à hurler.
" _Chut. Ça va aller. C’est fini maintenant. Nous sommes sains et saufs. Tout va bien aller. C’est fini.
_Kiara ! Venez vite ! Maman est très mal ! "

J’étais dans le coma, inconsciente de ce qu’il se passait autour de moi. Kiara se précipita dans le cockpit. Par la verrière, elle vit la poussière retomber autour du vaisseau. C’est alors qu’elle se rendit compte de notre situation. Nous étions au bord d’une falaise, le vaisseau menaçant de tomber dans le vide à n’importe quel moment.
" _Il faut sortir d’ici au plus vite. Prends les petits et sors. Je me charge de ta mère.
_Non. Vous sortez avec eux. Je reste avec elle.
_Fais ce que je te dis.
_Je suis Padawan depuis plus longtemps que vous. C’est mon maître et c’est ma mère.
_C’est justement parce que tu es Padawan depuis plus longtemps que moi que je te demande de sortir avec les jumeaux. S’il nous arrive quelque chose, tu pourras mieux te débrouiller que moi. Sors d’ici tout de suite ! je ne céderais pas. " Vociféra Kiara. " Pense à ce qu’elle dirait.
_Elle nous dirait de nous en aller toutes les deux !
_Ma-Lahossa ! Fous le camp ! "
Elle poussa violemment ma fille hors du cockpit, alors qu’une secousse faisait tanguer dangereusement le vaisseau.
Kiara avait un don pour guérir dans la Force. Elle était d’ailleurs devenue un très grand médecin grâce à ce don, sans qu’elle sache véritablement que c'était déjà la Force qui se manifestait en elle de cette manière. Ses réflexes de professionnelle prirent vite le dessus sur ses angoisses.
Ma-Lahossa de son coté avait pris les enfants et quelques affaires de survie. Mais la rampe d’embarquement refusait obstinément de s’ouvrir. Les systèmes s’étaient tous désactivés les uns après les autres, y compris les systèmes de survie.
" _Saloperie de bave de Hutt ! Tu vas t’ouvrir ! " Gronda la jeune fille.
Mais la rampe ne s’activa pas pour autant. Ni une ni deux, elle activa son sabre laser et plongea la lame dans l’écoutille. Le métal ne tarda pas à entrer en fusion au contact du laser. Ma-Lahossa découpait consciencieusement un passage. D’un coup de botte, elle expulsa le morceau de paroi. L’air saturé de poussière s’engouffra dans le vaisseau. La Padawan prit alors le sac qu’elle avait préparé en vitesse, et le jeta dehors. Elle attrapa alors les enfants dans ses bras. Pour les calmer, elle leur expliquait que c'était un jeu. Elle leur parlait d’une voix douce, mimant un jeu d’aventure. Les petits ne comprenaient pas vraiment la situation, mais l’attitude de la jeune fille donnait parfaitement le change. Elle les arrima solidement sur son dos avant de se jeter dans le vide. Elle n’avait d’autre solution que de sauter du vaisseau. La hauteur n’était pas très importante, mais suffisante pour se blesser durement si on ne savait pas se réceptionner, ou si on n’avait pas la Force pour alliée pour ralentir la chute. Elle se protégea le visage contre le vent glacé qui soulevait de la terre et de la poussière, en tourbillonnant. Elle sonda la Force pour rechercher un abri dans les rochers. Aucun danger ne les menaçait. Cela la rassura. Elle trouva finalement une ouverture dans les rochers. A nouveau, elle sonda la Force. Elle pouvait y entrer sans crainte. Elle déposa alors les enfants à l’abri de la tempête. Elle les installa le plus confortablement possible. Que faire maintenant ? Les laisser là, seuls et retourner au vaisseau aider Kiara auprès de son maître ou bien rester avec les enfants et attendre ? Elle hésita, inquiète. Mais elle connaissait les deux garnements. Seuls, ils ne tarderaient pas à se mettre en danger d’une manière ou d’une autre dans cet environnement hostile. Elle ne croyait pas une seule seconde qu’ils se tiendraient tranquilles. Ma-Lahossa se posta près de l’ouverture de leur petite grotte. Elle cherchait, sans vraiment y croire, à apercevoir la silhouette de Kiara qui m’aurait aidé à marcher pour les rejoindre, ou qui aurait porté mon corps inanimé. Mais les minutes s’écoulaient sans qu’elle ne vît rien venir. Elle sonda la Force pour tacher de savoir ce qu’il se passait à l’intérieur du vaisseau.

Je n’avais toujours pas repris conscience.
" _Lusiana, je vous en prie. Réveillez-vous. " Mais les suppliques de la padawan restaient vaines.
Elle tenta d’utiliser son scanner de poche relié à son datapad pour m’ausculter. Mais les instruments électroniques étaient devenus complètement fous. Plus rien ne répondait. Elle avança alors les mains au-dessus de moi et dans la Force pratiqua un sondage de mon état. Ce qu’elle ressentit n’était pas encourageant. Je perdais beaucoup de sang. Et l’hémorragie n’était pas encline à s’arrêter. Une nouvelle secousse vint la rappeler à l’ordre. Il fallait sortir du vaisseau au plus vite. Ma-Lahossa venait de la rassurer mentalement que les enfants allaient bien et qu’ils étaient en sécurité.
Elle m’empoigna alors à bras le corps et commença à me tirer hors du cockpit. Le temps que ma Padawan aille se réfugier dans la grotte avec les enfants, une petite couche de terre s’était déjà amoncelée dans l’entrée du vaisseau. Kiara me déposa à l’abri des rafales de vent qui s’engouffraient. Elle rassembla rapidement du matériel dans un ballot qu’elle lança au dehors. Elle décrocha alors un brancard et m’y allongea avant de m’y sangler solidement.
" _Je ne l’ai jamais fait, Lusiana. Il va falloir m’aider. "
Mais je restais toujours sourde à ses prières. Complètement absente, mon esprit s’était réfugié dans les tréfonds des méandres de mon inconscience. Je respirais faiblement et péniblement. Mon cœur battait à un rythme quasi imperceptible et irrégulier. C’était les seuls signes extérieurs de la vie qui m’animait encore. Kiara fit alors glisser le brancard vers l’extérieur. Quand celui-ci fut à mi-chemin entre le vide et l’intérieur du vaisseau, elle se concentra dans la Force pour le maintenir en équilibre lévitaire. Enfin, au prix d’un terrible effort mental, elle me fit descendre lentement vers le sol. Epuisée, il lui fallait pourtant me rejoindre. Le saut n’était pas très haut. Mais il était tellement facile de céder à la précipitation et de perdre son sang froid. Il lui fallait à nouveau invoquer la Force pour sortir et me rejoindre au sol.

La tempête était assourdissante. Pourtant de réflexe, Kiara appela ma fille.
" _Ma ! Ma ! "
C’était bien par pur réflexe. Raisonnablement, elle savait que la jeune fille ne l’entendrait pas. Kiara localisa alors ses enfants avec qui elle avait un lien privilégié dans la Force. Péniblement, elle parvint en luttant contre les bourrasques à m’amener dans la grotte. Ma fille nous attendait et précipita vers nous sans pouvoir dissimuler d’avantage son impatience et son angoisse. Elle avait commencer à installer le campement. Elle avait allumé une torche à ion qui grésillait dans l’atmosphère poussiéreuse de la grotte. Au dehors la tempête hurlait de rage. Kiara s’assura que ses enfants allaient bien. Les petits avaient cette insouciance de leur âge qui le faisait s’amuser de tout. Leur mère étant maintenant revenue près d’eux, ils avaient encore moins de raison de s’en faire.
" _Je retourne au vaisseau. " Dit alors Kiara essoufflé en se laissant aller contre la paroi rocheuse. " J’ai laissé du matériel au pied. On va en avoir besoin.
_Non. Cette fois, c’est moi qui y vais. " Protesta ma fille. " Vous êtes épuisée. Et vous saurez certainement mieux que moi vous occuper de ces deux monstres. " Ajouta-t-elle en désignant Liu Ken et Mai Olani.
" _D’accord. Tu le trouveras facilement. Il est au pied de l’ouverture de la rampe d’embarquement.
Ma-Lahossa se couvrit la tête avec sa capuche et resserra son manteau autour d’elle. Et elle sortit.
Kiara se pencha alors vers moi. Elle entreprit de vérifier les pansements rudimentaires qu’elle avait appliqués sur mes blessures les plus graves. Une plaque de métal qui s’était détaché du cockpit m’avait méchamment entaillé le ventre. Le sang coulait toujours même si l’hémorragie s’était un peu ralentie. Une vilaine plaie me déchirait la jambe gauche de la cuisse au mollet. Quant à la tête, elle avait heurté si violemment le tableau de commandes qu’elle s’était couverte d’ecchymoses et d’entailles qui saignaient, elle aussi. Kiara fouilla dans le medipack que Ma-Lahossa avait emmené avec elle. Elle y trouva des compresses de perigel qu’elle entreprit de m’appliquer, espérant que cela ralentirait un peu plus les plaies béantes.

Un doigt remua. Puis deux. Mes yeux sous leurs paupières se mirent à s’agiter. Ma bouche s’ouvrit sur un faible râle de douleur.
" _Lusiana ? Lusiana, réveillez-vous.
_Hummmmm.
_Lusiana, il faut ouvrir les yeux. Il faut vous réveiller. Revenez avec nous.
_Ki… Kia… Kiara.
_Ouvrez les yeux, Lusiana. Ouvrez les yeux. Il faut vous réveiller, pour que je puisse vous mettre en transe Jedi de guérison. Vous savez que je ne peux vous y plonger sans que vous ayez repris conscience.
_Kiara… le Temple… il faut… Ma-Lahossa…
_Elle est sauve. Ne vous inquiétez pas. Il faut ouvrir les yeux. " M’exhorta encore Kiara.
" _Mal… j’ai si… mal… Je…
_Oui, je sais, Lusiana. Je vais vous soigner. Mais il faut aussi m’aider. "
Je consentis enfin à ouvrir les yeux au prix d’un terrible effort de volonté. Mon corps protestait de douleurs. Je voulais me réveiller. Mais mon corps s’obstinait à vouloir m’attirer dans le gouffre noir du coma.
La voix de Kiara me venait de si loin que j’avais du mal à réaliser si elle était réelle ou le fruit de mon imagination. Je l’entendais m’appeler. Elle insistait pour que je reste éveillée. Mais j'étais si fatiguée. J’avais envie de dormir, de me laisser aller à cette obscurité si douce, si apaisante. Dormir… je n’avais qu’une envie, m’endormir.
" _Lusiana ! Reprenez-vous ! Réveillez-vous ! Le sommeil que vous éprouvez n’est qu’un leurre. Il est dangereux. Ouvrez les yeux ! Faites un effort que je puisse vous aider. Je vous en prie, je sais que c’est difficile, mais vous en êtes capable. Vous êtes forte. "
Je sentis alors l’esprit de la padawan toucher le mien, et m’insuffler une énergie nouvelle. Je sursautais. Tout était confus et chaotique. Kiara me parlait en esprit. Je voyais une lumière douce qui m’attirait, une prairie ensoleillée, et un arbre au milieu sous lequel il aurait fait si bon s’étendre.
"_Lusiana ! Restez avec moi ! "
Elle soutenait ce faible éveil que je manifestais encore. En même temps, elle éloignait les douleurs de mon corps meurtri.
" _Kiara… je ne…
_Lusiana, vous allez vous en sortir. Il faut tenir bon. Vous en avez la force. Ayez confiance en vous. Je peux vous soigner, mais il vous faut m’aider. Laissez moi entrer en vous pour que je puisse connaître l’étendue de vos blessures. "
Je lui envoyais une réponse positive.
Vivre… je ne voulais pas mourir ici. Ce n’était pas encore mon heure. Il n’en était pas question. Ma padawan n’était pas encore finie de former. Je n’avais pas encore terminé ma tache dans cette vie.
Je n’avais plus aucune notion du temps qui passait. Je me laissais complètement aller, puisant dans l’énergie de Kiara celle qui me faisait défaut.
" _Vous avez de très nombreuses blessures internes. Je ne vous cache pas que votre état est très sérieux. Mais vous allez vous en sortir, je vous le promets. "
Je sentis alors la présence de ma fille s’approcher de moi.
" _Je suis là, Maman. Nous allons t’aider. Aie confiance en nous. "
J’avais froid. Je sentis mes muscles se mettre à trembler. Mes dents se mirent à claquer. Kiara me recouvrit d’une couverture de survie.
" _Il faut trouver de quoi faire du feu. Il faut maintenir sa température corporelle. " Entendis-je Kiara prononcer au loin.
" _Je vais chercher du combustible. Je ne sais pas quoi, mais je vais trouver. " Lui répondit Ma-Lahossa.
_On dirait que cette roche est d’origine volcanique. Avec nos sabres, nous pourrions les chauffer.
_Oui, bonne idée. "
j’entendais des bruits. Mais je préférais me concentrer sur mon corps, pour éloigner les douleurs.
Les deux padawan avaient sélectionner quelques grosses pierres. Ma-Lahossa avait activé son sabre et déposé les pierres sur la lame. Elles ne tardèrent pas à rougeoyer diffusant une chaleur douce qui commença à me réchauffer.

Kiara continuait à me prodiguer ses soins. Elle avait réussi à engager le processus de cicatrisation au niveau des coupures qui cisaillaient mon cuir chevelu. Les deux compresses de perigel qu’elle m’avait appliquées sur le ventre avaient un peu ralenti l’hémorragie. Mais le sang s’épanchait toujours. Je sus plus tard, à notre retour sur Coruscant toute l’étendue et la gravité de mes blessures. J’avais été projetée et bringuebalée avec une telle violence contre les parois du poste de pilotage du vaisseau que mes membres s’étaient brisés comme de vulgaires brindilles. La moelle épinière elle-même n’avait pas été épargnée au niveau des vertèbres lombaires. J’étais paralysée des membres inférieur. Mais à ce moment là, dans la grotte, je ne m’en apercevais pas. Kiara avait du le sentir lors de son auscultation mentale. Mais elle avait réussi à me le cacher afin que je garde mes forces.
La nuit commençait à tomber lorsque nous entendîmes un grand fracas. Je sus tout de suite de quoi il s’agissait. Le vaisseau, en équilibre précaire, avait fini par basculer dans le vide. Nous étions désormais complètement isolées. Et notre maigre espoir de pouvoir encore faire fonctionner le système de communication avait sombré avec l’engin.

La neige se mit alors à tomber. C’était ce que j’entendis Ma-Lahossa dire à Kiara.
" _Au moins, nous allons avoir de l’eau. "
Mais avec la neige, le froid s’était intensifié.
Un autre grondement assourdissant résonna dans la caverne. Des blocs de pierres gros comme des maisons roulaient à l’extérieur de la grotte, dans un maelström fantastique dans le couloir dans lequel notre vaisseau avait glissé sur le ventre. Il s’agissait en fait d’un couloir d’avalanche.
" _Dès que la tempête aura cessé, l’une de nous partira pour Danis. Il nous faut des secours au plus vite. " Décida Kiara.
" _J’irais. Les enfants et ma mère ont besoin de vous.
_J’aurais voulu partir. Mais tu as raison. Je suis certaine que tu réussiras.
_Bien sur que je réussirais. Je ne m’inquiète pas non plus. " Ma padawan se tut. La tension était palpable. Toutes les deux cherchaient vainement à cacher leurs inquiétudes. Mais dans mon semi-coma, je pouvais quand même ressentir les troubles dans la Force, et l’angoisse qui les causait. " Ne devrait-on pas lui faire boire un peu de soupe ? " Demanda-t-elle.
" _Non, ce serait dangereux dans son état.
_Kiara… " appelais-je.
" _Lusiana, comment vous sentez-vous ?
_Mal… gorge… sèche… soif…
_Je sais. Mais il ne faut pas boire pour le moment à cause de vos blessures internes.
_Transe… guérison. Je peux… maintenant.
_Vous en êtes sure ?
_Oui… confiance… lucide… je suis. " J’esquissais un pénible sourire. " Voilà que… je parle… comme Yoda. Mes idées sont… claires… la preuve.
_D’accord, Maître. Allons-y. Avec quel mot souhaitez vous être réveillée ?
_Je ne sais pas… Drall. C’est facile à retenir, et on ne l’emploie pas à tous les détours de conversation.
_Entendu pour Drall. "

Kiara me posa alors les mains sur le front. Je fermais les yeux. Je ne tardais pas à rencontrer son esprit. Ensemble, la Force nous guida vers l’état de transe par lequel je pouvais trouver le chemin vers chacune de mes cellules pour commencer à les guérir. Kiara me laissa alors seule avec moi-même après m’avoir expliqué qu’elle se connecterait régulièrement à mon esprit pour soutenir cette transe thérapeutique.
Les heures passaient. Les petits s’étaient endormis emmitouflés au chaud contre ma fille, non loin des pierres qui dispensaient toujours de la chaleur. La nuit était tombée sur Artonis. Kiara était désormais seule à veiller. Je commençais à faire de la fièvre. Elle redouta alors une infection septicémique. Il fallait me réveiller de ma transe. Rester dans cette hypnose alors que la fièvre risquait de me faire délirer était particulièrement dangereux. Mon esprit pouvait rester prisonnier de cet état hypnotique. Il pouvait très bien s’enfoncer dans une crise de délire et en garder de très graves séquelles.
" _Lusiana, Drall. " Je ne répondis pas. " Drall, Lusiana. Je vous en prie, il faut vous réveiller. " Kiara se concentra alors dans la Force pour se connecter à mon esprit.

Je consentis enfin à ouvrir les yeux dans la pénombre de la grotte. Kiara avait pris de la neige qu’elle avait mise dans un des récipients qui avait servi pour le dîner. Elle en imbibait un linge avec lequel elle commençait à me tamponner les tempes. Malgré le froid, je transpirais de fièvre. Avec le réveil, les douleurs étaient revenues. J’étais exténuée. Je ne parvenais plus à me concentrer dans la Force pour lutter contre les terribles déchirure que je ressentais dans ma chaire. J’avais mal. J’avais horriblement mal. Je ne pouvais même pas geindre tant j'étais fatiguée. J’avais les yeux ouvert sur l’obscurité de la grotte, à moins qu’ils n’étaient fermés.
" _Tenez bon. Vous allez vous en sortir. J’en suis sure. Tenez bon, Lusiana. " M’encourageait Kiara.
Au dehors, les bruits de la nuit, le sifflement sinistre du vent, les grondements sourds des chutes de pierres et des avalanches de neige, rendaient l’atmosphère lourde et inquiétante. Kiara continuait de me tamponner le front avec le linge imbibé d’eau froide. Soudain, je sentis son geste suspendu au-dessus de mon visage. Quelque chose avait retenu son attention. A l’écoute de tous ces sens, elle sonda la nuit. Rien d’inquiétant. Elle reprit alors les soins. Quelques minutes plus tard, elle tendit à nouveau l’oreille. Cette fois c'était certain. Quelque chose approchait. Elle ressentait une présence. Elle sonda la Force pour déterminer s’il s’agissait d’un danger.

" _Ma-Lahossa. Réveille-toi.
_Que se passe-t-il ? " Demanda aussitôt ma fille qui ne dormait que d’un œil.
" _Quelque chose approche dehors.
_Hostile ?
_Je ne sais pas encore. " Répondit Kiara.
" _Je ne ressens rien d’inquiétant. " Rétorqua ma padawan.
" _Moi non plus. Mais… il y a une signature dans la Force que je n’arrive pas encore à déterminer.
_Je la sens aussi. " Acquiesça ma fille.
Les deux padawan empoignèrent alors leur sabre sans pour autant les activer. Et elles attendirent.

La presence dans la Force se faisait de plus en plus forte. Une ombre vint alors obscurcir l’entrée de la grotte dans le halo pale du satellite qui eclairait sporadiquement la nuit artonisienne entre les gros nuages lourds de neige, une silhouette impressionnante.